L’INPI a rejeté la demande des couteliers de Laguiole. La décision prise le 7 avril a été envoyée par mail à Honoré Durand président du syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de Laguiole le lendemain en fin de journée…
Parmi les motifs invoqués, un manque de représentativité du syndicat, dû à l’absence de petits artisans indépendants dans la structure.
«L’IG implique une démarche volontaire, on les a rencontrés en réunion mais on ne peut les forcer à s’impliquer. Cependant lorsque l’on réunit 220 des 250 salariés de la zone laguiole, en quoi cela ne serait pas suffisant pour être considéré comme représentatif »ironise le coutelier laguiolais.
« Un contrepied à la relocalisation«
Mais c’est le second motif de rejet qui fait tousser les laguiolais. Pour l’INPI, la zone Laguiole Aubrac ne serait pas pertinente car la notoriété du couteau viendrait de Thiers.
«C’est un contre-pied à l’esprit de la loi sur les Indications Géographiques des produits manufacturés qui visait à la relocalisation de productions. Car la notoriété actuelle du couteau de Laguiole – et qui explique son succès commercial – a été relancée dans les années 80 grâce au travail de la Forge de Laguiole – aidée par l’Académie du Couteau de Laguiole – NDLR-» poursuit Honoré Durand.
Lire à ce sujet un article paru dans le mensuel Science Et Vie Economie de mai 1992.
Néanmoins, si on plonge plus loin dans l’histoire, l’absence de Calmels dans le groupement des laguiolais est lourde. Cette maison emblématique de Laguiole, du nom du premier artisan à avoir donné ses lettres de noblesse au Laguiole a une boutique à Laguiole mais ses couteaux sont fabriqués à Thiers …
«C’est un handicap que Calmels ne soit pas avec nous. Il a été le premier à délocaliser la production de couteaux à Thiers dans les années 50, il préfigure peut-être ce qui va se passer dans les années 2020»
confesse Honoré Durand. Oups ! A-t-on bien entendu ?
«Si l’IG Thiers passe, on n’aura plus aucun intérêt à fabriquer à Laguiole », poursuit celui qui a aussi repris une coutellerie à Thiers …
Alors ? Il ne semble pas encore question de rejoindre les thiernois. Mais la lassitude face au remix sans fin de la guerre picrocholine Thiers-Laguiole éternellement ressassée commence à émousser les meilleures bonnes volontés. Cette mention IG sur les lames de leur couteaux Laguiole en vaut-il vraiment la chandelle… Certains acteurs laguiolais tel Christian Valat – autre poids lourd du syndicat avec Laguiole en Aubrac- s’interroge sur le prix à payer pour poursuivre la procédure. Car pour contester la décision de l’INPI il faudra bien remettre au pot pour supporter les frais d’avocat d’une procédure d’appel à la Cour d’Aix-en-Provence dont il n’est pas sûr qu’elle débouche sur un résultat positif… Bref, il est probable qu’ils attendront fin mai pour la publication de la conclusion de l’INPI concernant la procédure initiée par les couteliers Thiernois pour se décider.