Emma Calvé, immense soprano, fut une star avant l’heure, par son talent, sa renommée, ses lubies comme ses fureurs. Elle en précéda d’autres par ses excentricités : Joséphine Baker et son château sur la Dordogne ou Georges Harrison et John Lennon avec leurs mages Hindous. Emma avait elle son mage swanni et tâta des sciences occultes.
Ce rossignol, né à Decazeville en 1858, fut, à son époque qualifiée de Belle, aussi célèbre que ne le fut la Callas soixante ans plus tard.
Massenet écrivit des opéras pour Emma tels que Sapho.
Quant à Carmen , jamais Soprano au monde ne l’interpréta autant de fois.
L’Amérique la vénérait. Drapée dans un drapeau tricolore pour entonner la Marseillaise sur les scènes américaines, elle contribua à l’engagement des États-Unis dans le premier conflit mondial.
Il faut relire la presse new-yorkaise de 1900, on croirait lire un article sur Tina Turner ou Mick Jaegger déclarant une fois de plus que c’est leur dernière tournée.
Celle qui fut l’amie des têtes couronnées n’eut pas la grosse tête. Elle demeura toute sa vie l’enfant des Causses sans jamais renier ses origines paysannes et rouergates. Née à Decazeville, en 1858, où son père entrepreneur du BTP boisait les mines, elle passa son enfance entre Roquefort et Tournemire où son père s’était ensuite établi pour participer à la construction de la ligne des Causses, pour le compte de la compagnie du Midi.
Et Emma mit toujours en avant ses origines. C’est cet aspect du personnage que Georges Girard, son plus fidèle admirateur, apprécie le plus. «Lors d’un récital, il lui arrivait souvent de reprendre des chansons occitanes. Quant à la bourrée, elle la dansait merveilleusement bien».
Elle avait fait de son château de Cabrières qu’elle avait acquis pour se ressourcer dans son pays, une sorte de sanatorium pour les enfants pauvres de Millau.
Elle n’hésita pas à soutenir les ouvriers gantiers millavois lors de leurs grandes grèves durant les années trente.
Voilà longtemps qu’elle n’était déjà plus la star qu’elle était durant la belle époque. Comme Mozart, elle décéda dans la misère et l’indifférence générale en 1942.