Politique

Sud aveyron : la révolte de l’hôpital

Il est des “pays“ qui ont du mal à se laisser mourir. Le Saint-Affricain, cet Aveyron méridional avec ses terres rouges, ses brebis lacaune et ses villages nichés au creux des vallées, s’est rappelé, fin octobre, à l’existence des pouvoirs publics pour la défense de son hôpital. Un “petit hôpital“ qui répond aux besoins d’une population de près de 30 000 âmes.
Menacé depuis des années, dans le cadre de la réorganisation des services hospitaliers visant à créer un seul hôpital par département, l’hôpital de Saint-Affrique devait dire adieu le 1er novembre à son service de réanimation, à sa chirurgie, à son astreinte radiologie, rapatriées à Millau.

greve

Inacceptable pour les professionnels et la population qui ont employé les grands moyens pour obtenir l’annulation de la mesure : manifestation massive dans les rues de St Affrique, vote massif, grève de la faim par un médecin chef de service, un pompier une infirmière et deux aides soignantes, menace de démission collective des 58 maires des cantons et six conseillers généraux avec grève administrative. Et cerise sur le gâteau : occupation sauvage du chantier du plus haut viaduc du monde. Moyen de pression très sensible puisque c’est Eiffage qui supporte le coût de la concession. Mais beau symbole pour des médias en mal d’images fortes. «On voulait mettre en parallèle que l’on pouvait réaliser le plus haut viaduc du monde et laisser mourir en même temps le petit hôpital de Saint-Affrique distant 20 km de là.» TF1, France 2 et consorts n’ont pas raté le reportage.
Trente ans après le Larzac qui avait lui aussi mobilisé l’intégralité de la population et des élus, c’est une autre bataille gagnée. Cette révolte met de l’eau au moulin de ceux qui croient à une notion de “pays“appuyée sur une perception du terrain, et renvoie à leurs chères études les tenants d’un aménagement du territoire tracé dans les bureaux. Elle renforce, le caractère frondeur mais légitime de ces terres sud-aveyronnaises enclavées par le relief mais capables de se mobiliser sans esprit partisan.
Elle est aussi un cri d’alarme de ses habitants contre la perte d’attractivité de leur territoire qui leur semble parfois orchestrée par l’administration et les services publics. Ainsi de leur refus d’un désert sanitaire, prélude à un désert total.
Ce mouvement intervient quelques semaines après la fin du train de nuit Paris-Millau(voir rubrique forum) . Dans les deux cas, la logique économique est irréfutable devant les déficits et l’on sait les entreprises de France pressurées par un des taux les plus élevés des prélèvements obligatoires. Il n’empêche la grogne est plutôt contre ce qui est jugée parfois comme une utilisation aberrante des fonds publics qui désarçonnent l’homme du peuple. «Est-ce qu’on peut comprendre qu’on ferme un hôpital qui répond aux besoins de la population et qu’à côté on se paye des ronds points à coût de millions où que l’on se finance un parc déficitaire sur les insectes à 100 millions de francs » s’emportait un élu d’un village du Saint-Affricain. Cette fermeture, intervient alors même que l’on voit des jeunes et de nouvelles populations -anglais, belges et danois- s’établir dans les villages et pas simplement pour les vacances.
On rappellera dans le même ordre les problèmes de communication sur l’internet haut débit qui font parfois fuir les entreprises du Sud-Aveyron, les connexions des portables ou même parfois les ratées du téléphone fixe dont le réseau remonte à Maurice Thorez.