Quelle entreprise peut aujourd’hui se passer de l’Internet ? Même la plus artisanale se voit un jour demander par un client l’envoi d’un devis par e-mail ou l’envoi d’une photo numérisée d’une de ses réalisations. En dépit de ses vicissitudes, l’Internet continue de constituer un gisement pour la création d’emplois, par exemple pour les petites entreprises de logiciels. Mais comme son nom anglo-saxon l’indique, la première condition d’Internet est d’être connecté au réseau.
Sur ce point, tout comme pour les téléphones portables cela cloche en Aveyron. Les centres urbains (Rodez, Millau, Saint-Affrique) sont reliés à l’Internet rapide haut-débit, par l’ADSL. Une technique qui permet de faire passer dans le “tuyau“-le réseau téléphonique classique boosté- , jusqu’à 20 fois plus de données qu’un modem 56 kbits branché à une ligne téléphonique normale. Mais, compte tenu de son coût, l’ADSL ne va pas dans les zones rurales ni même dans les zones industrielles à la périphérie des villes. En Aveyron, les deux tiers des chef-lieux de canton ne sont pas couverts.
Jusqu’à maintenant, le débat du haut-débit passait loin au dessus de la tête de la plupart des édiles rouergats. Ils prêtaient une oreille distraite à l’ado qui se plaignait de ne pouvoir télécharger son tube préféré tout en ne comprenant rien à ce charabia. Mais quand l’entreprise locale a menacé de déménager car la connexion Internet sur place était nulle, ce fut une autre histoire. Aujourd’hui, des élus comme Jacques Godfrain tirent la sonnette d’alarme. Et les collectivités locales, Conseil régional et Conseil Général, étudient les investissements de câblages pour étendre la toile du haut débit sur tout Midi-Pyrénées afin de « renforcer l’attractivité des territoires ». Ainsi le Conseil Régional Midi-Pyrénées a adopté le 13 mars un plan d’actions régional doté de 40 millions d’euros de crédits sur la période 2003-2006 afin de développer les services de haut débit aussi bien dans les zones urbaines que dans les zones rurales
Mais il ne faut pas se payer de mots. Car le haut-débit est très cher et compte tenu de la vitesse des progrès technologiques, il n’est pas facile de voir où l’on va. La seule chose dont on soit sûr c’est que les inégalités de traitement criantes entre citoyens –par exemple entre Aveyronnais des champs et Rouergats urbains- concernant les nouvelles technologies et risquent bien de le demeurer encore un certain temps.
Le Conseil Général ne se veut pas en reste. On explique que l’objectif politique est de relier en fibres optiques tous les chefs lieux de canton, première condition de l’ADSL. Mais à 60 000€, (400 000 ex-francs) l’équipement pour équiper un central analogique et ne couvrir qu’un rayon de 5 km au mieux à la ronde, il est vain de croire que tous les villages y auront accès dans deux ou trois ans. «Il y a des zones où le coût financier de la fibre optique la rend hors de propos, confie Alain Portelli, n°2 des services du Conseil Général d’Aveyron Il faudra alors rechercher des technologies de substitution – liaisons wi-fi ou liaison satellite- qui nous permettent de mieux mutualiser les coûts afin d’apporter du haut–débit à des coûts plus supportables. Mais nous n’en sommes qu’au stade préliminaire des études.» Une borne wi-fi (qui autorise les liaisons sans fil) c’est encore très cher. 45 000€ au bas mot selon les techniciens du Conseil Général. «Avec l’accélération technologique, on a toujours l’impression d’être en décalage de quelques mois. Mais si on ne fait rien, c’est l’attractivité de ce département rural qui sera en jeu. » explique Alain Portelli.
La fibre optique semble donc la technologie la plus pérenne et la plus fiable aux yeux des élus. Ce qui ne va pas forcément de soi avec les technologies hertziennes. Après la pose des fils, il faudra les exploiter. «On lancera une consultation pour identifier des opérateurs du réseau départemental. Et si cette consultation était infructueuse, alors, la collectivité pourrait le gérer en direct. » poursuit Alain Portelli. C’est d’ailleurs tout l’objectif de l’amendement récemment adopté par des parlementaires lors de l’examen de la loi sur le numérique. Il vise à permettre aux collectivités de ne pas simplement poser les tuyaux mais de devenir opérateurs en cas de carence du privé. Or malheureusement, en Aveyron avec son relief, et sa désertification, il risque bien d’y avoir carence..