Terroir d'Aveyron

Pérail, la bataille reprend pour décrocher l’AOC

Les producteurs de pérail ne désarment pas. Ce petit fromage rond d’environ 150 grammes réalisé à partir d’un caillage de lait de brebis revient de loin. Aujourd’hui, il cartonne au Japon comme chez les « bobos » de la capitale. Moins gras que les fromages au lait de vache, plus évocateur d’authenticité, on en trouve par exemple chez « Lenôtre » à Paris à des prix qui ne sont pas les nôtres… Le Pérail affirme son identité sud-aveyronnaise même si on le produit aussi dans quatre départements voisins (Tarn, Lozère, Gard et Hérault). Pour être consensuel, disons que c’est un fromage caussenard.

C’est à Jean-François Dombre du Pérail des Cabasses que l’on doit d’avoir cru au pérail. Natif de Millau, cet ancien berger a créé sa structure en 1982. Il emploie aujourd’hui une douzaine personnes pour 60 tonnes produites. Il a pris la tête de l’Association de Défense du Pérail qui réunit d’une quinzaine de producteurs pour une production totale de 1000 tonnes et 350 emplois. Pas mal pour un fromage qui voilà encore 30 ans vivotait.

Parmi les producteurs concernés, on relève le groupe Lactalis (Roquefort Société) qui ne manque pas de lait de brebis… et se verrait bien produire du pérail AOC sous sa marque Lou Pérac. Pour les autres producteurs n’est-ce pas là, laisser entrer le renard dans le poulailler ? «Au contraire, on va profiter de la notoriété de Lactalis pour mieux faire connaître le pérail» explique un producteur. Et puis cela va les obliger à recourir à des laits micro filtrés qui faute d’être crus seront au moins produits sur place par les éleveurs». Ça sera toujours mieux que d’importer du lait congelé vendu trois fois moins cher que le lait des brebis « Lacaune » locales. Reste que Lou Pérac devrait représenter les 3/4 de la production des pérails. Bref, si l’on a bien compris, il s’agit de raccrocher une AOC naissante à une marque. Pourquoi pas ? Sans doute, cela vaut-il mieux que son contraire et qu’un marque cannibalise une AOC, comme le risque plane toujours avec Société et Roquefort…

Le dossier est dans les mains de l’INAO (Institut National des Appellations d’Origine) qui a déjà rejeté une première demande d’AOC car il trouvait le lien au terroir trop ténu. D’où une montée au créneau des élus principalement aveyronnais lors du SIA 2014. Tant il est vrai que l’obtention de cette AOC pérail représenterait une garantie pour les éleveurs locaux à s’assurer un débouché pour leurs laits de brebis autres que ceux concourant à la fabrication du roquefort. Mais aussi et surtout d’éviter que le pérail ne devienne un nom de fromage générique indistinct pouvant être produit un peu partout en France. Alors que ses racines caussenard remontent avant l’installation des Templiers du Larzac ?

A propos des marques et des AOC, lire également Le Bleu des Causses sous marque Société

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