Avec sa blouse, son galurin et son accent rocailleux, on pourrait croire que Bruno Druilhe est descendu de son buron à la fin de l’estive et qu’il s’est égaré à Paris. Et pourtant, il connaît la capitale comme sa poche et l’arpente depuis 1979. Il n’est pas rare qu’au détour d’une artère parisienne on tombe sur son enseigne. Ce natif du pays naucellois est le créateur de Chez Papa, réseau d’une douzaine de restaurants orientés bonnes fourchettes du Sud-Ouest.
Joli parcours pour ce pur indépendant qui a suivi son chemin à l’écart des circuits habituels de la limonade aveyronnaise. Après un apprentissage en cuisine à Toulouse, en 1979, il travaille avec Louis Deconquand, fameux bougnat cantalien du 9e qui le prend pour tenir l’Oustalou. Quelques années plus tard, il le pousse à s’émanciper. Première gérance libre Chez Gladines en 1985 rue de la Butte aux Cailles dans le 14e . «Avec 25 places, on faisait 350 couverts par soir, on faisait manger les gens sur le toit des voitures et j’offrais une salade Boyarde aux automobilistes qui étaient d’accord qu’on tende une couverture sur leurs toits. » A la fin des années 80, il en est déjà à quatre « Chez Papa » dans le 10e, le 13e, le 14e et le 15e. De ces années, il a nourri une passion frénétique pour le « coup de feu ». Ce sentiment de l’urgence à servir une foule de convives le fait vibrer comme une sortie dans l’espace pour un astronaute.
Aujourd’hui encore, quand il débarque dans un Chez Papa, il file en cuisine, s’empare d’une marmite d’aligot ou de truffade pour faire le service lui-même. Et il salue les clients qui rentrent et sortent avec une jovialité si sincère et contagieuse que tout le monde croit le connaître depuis toujours.
« Papa Druilhe » a construit les choses comme elles venaient. A commencer par son logo et le nom de ses restaurants. «Quand certains avaient vraiment trop bu, je me débrouillais pour trouver les clés de voiture. De là, tout le monde s’est mis à m’appeler Papa. Et un jour, un gars que j’avais empêché de conduire a débarqué avec un tableau de moi pour me remercier. Ce portrait est devenu le logo de mes restaurants. Et il n’a pas changé depuis 30 ans. »