Urbain Cancelier joue l’épicier Collignon dans le fabuleux destin d’Amélie Poulain
Collignon d’Aveyron ! Dans ce succès si justifié du Fabuleux destin d’Amélie Poulain, Collignon, le vil épicier ne compte pas pour du beurre. Le méchant du film, franchouillard, raciste et paternaliste, auquel Amélie tend d’espiègles pièges, est un originaire d’Aveyron. Urbain Cancelier puise ses racines du côté de Sainte-Geneviève-sur-Argence. Cet homme d’ancien régime, comme il le laisse entendre, est d’abord un comédien hors pair qui sait vous faire Louis XVI dans Ridicule ou entre amis vous poser son homme des burons.
« L’Aveyron me prend aux tripes, quand j’y vais et qu’on aborde le Cantal, ça commence sérieusement à me travailler. »
Mais voilà, Urbain n’a pas échappé à la malédiction de ses ancêtres. Depuis trois générations, ces hommes vivent avec l’Aveyron une relation plus que contrariée, presque un amour maudit. Les fautives sont les femmes qu’ils ont épousées et qui rejettent le pays… « Déjà mon grand-père avait voulu revenir au pays après la guerre de 14 mais ma grand-mère l’en avait dissuadé Quant à mon père, il adorait aussi l’Aveyron, il m’a transmis la fibre. Quand nous descendions gamins vers l’âge de 10 ans, c’était le rêve total. Mais, ma mère n’avait pas plus d’amour pour l’Aveyron ! Pour elle, l’Aveyron était synonyme de grosses bouffes, d’hôtels peu confortables et de gens à qui elle n’avait pas grand chose à dire. »
« Quant à ma femme, elle préfère l’Ile d’Yeu. Elle ne supporte pas que je sorte d’un restaurant où je viens de déguster des truites et de la truffade et que je pense à ce que je vais manger le soir. »
Cette relation contrariée, l’a aussi été par des ventes -malheureuses- de biens de famille comme cette petite ferme qui dominait la vallée d’Argence. « Elle a été vendue voilà quelques années pour pas cher alors que toute mon enfance, je l’avais eue en tableau accroché aux murs de sa chambre. Je me suis toujours dit que quand je serai grand, je l’achèterais ». Heureusement, il a sa belle cousine de Sainte-Geneviève, Françoise Lépine.
A Paris, Urbain compense ce manque de pays en fréquentant quelques adresses bien choisies. « La meilleurs truffade, c’est celle du Plomb du Cantal mais j’aime aussi celle du Zéphyr en face du passage des Variétés. »
Il est comme ça Urbain, c’est une force de la nature, un coup de fourchette à vous laisser assis un Bérurier. Il dit de lui qu’il est boulimique, il y a plutôt chez lui une sensualité du goût pour les bonnes choses. Il suffit de l’observer filer un aligot, alliant force et souplesse tel un lutteur de Sumo pour comprendre ça. Ce rapport charnel à la gastronomie lui vient de son enfance aveyronnaise. « Avec mon frère, quand nous avions huit ans nous allions manger dans un « bougnat infernal » de Sainte-Geneviève, le menu coûtait 9 francs, le dessert, une tarte aux pruneaux, coûtait 1 franc. Mais chaque fois, la patronne nous l’offrait. » Des souvenirs comme ceux-là, ça vous marque pour la vie.