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« Les Bêtes noires. Des chemins de fer dans le Massif central »

Avec ses « Bêtes noires », Daniel Crozes se fait ferrovipathe…

Cette fois-ci Daniel Crozes, l’écrivain aveyronnais semble avoir troqué sa passion pour le Rouergue pour celle du chemin de fer. Mais les deux passions ne sont pas vraiment exclusives car Dieu sait si le train a compté dans l’histoire de l’Aveyron et du Massif central à la fin du XIXe siècle. Sans lui, le couteau de Laguiole serait-il aussi connu ou les bougnats auraient-ils été aussi nombreux à monter à Paris ? Et le Ségala serait-il aussi riche sur le plan agricole ? On pourrait parler également du trafic des vins du Languedoc sur Paris qui suscita une concurrence effrénée des compagnies . Ce qui ne fut pas le cas des tomes de Laguiole sur l’Aubrac ni des fromages de Cantal du Carladez, deux pays qui eux ne virent jamais l’ombre d’un rail…

Alors ces fameuses bêtes noires, « bestia negra », ce sont bien les locos cracheuses de fumée apparues dans les reliefs du Massif Central, à partir de 1840 avec l’édification des lignes par les compagnies de chemin de fer du Second-Empire. Foin de désenclavement des populations ! au départ, il s’agissait d’élargir les débouchés des bassins miniers, ceux d’Alès dans le Gard, de Decazeville dans l’Aveyron ou de Carmaux dans le Tarn.

betes_noires_crozes2Daniel Crozes met en lumière les travers et turpitudes des financiers des compagnies ferroviaires pour se partager le gâteau. Comment par exemple les Compagnies du PLM, du Paris Orléans et du Midi se répartirent les restes de la compagnie du Grand Central. Mais ce beau livre donne aussi l’occasion de revenir sur ces prouesses techniques que furent la construction de ces voies ferrées qui aujourd’hui encore demeurent spectaculaires du fait de leur dénivelé impressionnant. Pour les réaliser ce sont des milliers d’ouvriers qui déboulaient et suscitaient la crainte des riverains et la suspicion des gendarmes.

Aujourd’hui encore leurs ouvrages d’art audacieux , comme celui de Garabit au dessus de la Truyère signé Eiffel ou du Viaur, parviennent à faire stopper l’automobiliste admiratif. Ainsi ces lignes des Causses ou des Cévennes demeurent des éléments de premier ordre dans le patrimoine français. Et on se dit qu’il est dommage qu’elles ne soient pas mieux exploitées sur le plan touristique. Par exemple grâce à des voitures panoramiques -comme l’on fait les chemins de fer suisses ou américains- pour des touristes en quête de merveilles paysagères. Seulement pour les huiles de la SNCF, hors du TGV, point de salut.

Les bêtes noires
Des chemins de fer dans le massif central
Daniel Crozes
Photographies : Pierre Soissons et Pierre-Louis Espinasse

Editeur : Rouergue
Prix : 39 €