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La femme du diable, le dernier roman de Daniel Crozes

Cette « Femme du Diable » à laquelle Daniel Crozes a donné vie s’inspire de la vie d’Antoinette Durand de Gros. « Elle fut qualifiée en 1924 par la presse britannique de femme la plus dangereuse d’Europe», souligne l’écrivain et infatigable chroniqueur du Rouergue qui depuis toujours fait son miel des destins extraordinaires d’Aveyronnais anonymes ou célèbres.  

Sacrée Antoinette ! Cette Aveyronnaise militante féministe à la fibre ouvrière et révolutionnaire, née à Paris en 1864, avait de qui tenir. Son grand-père avait échoué à fonder à Rodez un phalanstère, cette utopie d’u lieu de vie communautaire chère à Charles Fourier. Républicain inflexible il est déporté six ans en Algérie pour s’être opposé au coup d’état de Napoléon III de 1851. Son fils, également opposant au régime impérial, s’exile quant à lui aux Etats-Unis et devient médecin spécialiste de l’hypnose. Il se marie avec la fille d’un noble russe et revient à Paris avant de rejoindre Rodez et le domaine familial d’Arsac en 1870.

C’est à Nice, en 1884, qu’Antoinette se marie – malgré l’opposition de son père- avec un journaliste polémiste Auguste Cauvin, très engagé dans la dénonciation de la corruption des élus de la ville…Elle aussi devient journaliste plus tard mais elle est en poste à Bruxelles et notamment correspondante du quotidien des socialistes français la Petite République avant de rejoindre son siège parisien. Militante féministe, elle consacre des chroniques au « bagnes féminins » mais suit de près les grands mouvements sociaux dans différents pays d’Europe en tant que socialiste révolutionnaire. « C’était une sorte de Louise Michel aveyronnaise »  souligne Daniel Crozes. En 1907, en Aveyron, elle soutient la grève des cabanières, les ouvrières des caves du roquefort, pour une augmentation de salaires. Un an plus tard, elle est en Italie lors de la grève du Parmesan, celle des ouvriers agricoles contre les grands propriétaires. Accusée d’incitation au régicide, elle encourt la peine de mort et ne sera condamnée finalement qu’à deux mois de prison après une mobilisation de la presse française. En Grande-Bretagne, en 1911, elle est un fer de lance des grèves massives dans les transports. 

Paris, place de la République – avril 1907

Au début de la Guerre de 14, elle vient en aide aux blessés et participe début 1915 à une mission secrète à Milan pour convaincre les Italiens de rejoindre la Triple Entente ( France, Russie, Royaume-Uni) . Revenue après guerre au domaine familial d’Arsac proche de Rodez, elle échoue face à l’opposition des grands propriétaires aveyronnais, à imposer la journée de 8 heures pour son personnel. Au lendemain du 1er conflit mondial, elle témoignera de sa désillusion après les espoirs nés de la Révolution d’octobre. Elle abandonne le militantisme et déclare ne plus être révolutionnaire tout en restant socialiste. Elle prêche «pour la collaboration de toutes les classes ».

A propos du roman la « Femme du Diable »

Inspiré par la vie d’Antoinette Durand de Gros, Daniel Crozes imagine une Marianne Cancelier, son héroïne dans le tout début de la Grande Guerre, en Aveyron, entre la détresse des familles et des blessés et les premiers actes des profiteurs de guerre. Daniel Crozes livre là le portrait d’une femme hors du commun qui fut réputée « la plus dangereuse d’Europe ».

Daniel Crozes
La femme du diable
Rouergue – 325 pages –
prix : 22€