Communauté Portraits

Jacques Dereux, grande gueule de l’Aubrac

dereux1Il ne cesse de photographier son Aubrac quand il s’y trouve. A Paris, il expose périodiquement ses clichés. Intitulée Brumes, sa prochaine expo se tiendra du 18 au 22 mai à l’Espace 117, rue Saint-Dominique au 117.

La photo, la peinture, Jacques Dereux est un touche-à-tout éclectique mais aussi et un grand connaisseur de l’alimentation. Cet Aveyronnais de Paris est surtout une «grande gueule» qui ne s’économise pas pour faire connaître son Aubrac. Mieux que 100 attachés de presse réunis, il a contribué –parfois à leur insu- à la notoriété de quelques producteurs. L’homme sait d’où il vient, d’un père espalionnais parti de rien monter une entreprise de nettoyage sur Paris. Le fils n’a pas repris la boîte paternelle, il a renoué avec l’atavisme rouergat en passant par l’école hôtelière à Paris. A 23 ans, dans les années 70, il ouvre le « Dansk Pop » rue de Rivoli. Initiateur de tendances avant l’heure, il lance dans les années 80 une boutique qui fera parler d’elle dans le 6ème. “Tant qu’il y aura des hommes” est une espèce de concrétisation de la rubrique “La Défonce du Consommateur” du magazine masculin Lui qui marqua les années soixante-dix.

Mais c’est avec cette boutique qu’il décide, avec quelques amis, de soutenir la relance de la fabrication couteau de Laguiole à Laguiole même. Avec ses copains, il fonde l’Académie du Couteau de Laguiole, (ACL). Elle va drainer des centaines de personnalités et des fans. Tos vont communier au revival du Laguiole. “Tant qu’il y aura des hommes” devient ensuite le nom d’un restaurant qu’il lance dans le 16e et qui fera un carton durant 4 ans. Il le revend pour devenir conseiller culinaire, une sorte de cabinet de tendance justement baptisé « So Food. ! consulting »

Entretien donné le 14 mars 2010

Quand on vous connait un peu, on sent que vous avez le pays dans les tripes ?
J’ai toujours défendu le Pays. Que ce soit le fromage ou le bœuf fermier aubrac Bio que j’ai mis chez Costes et chez d’autres. J’envoie les gens dans les restaurants du pays. Mon père faisait ça aussi, je continue. Pas question d’arrêter ce prosélytisme.

dereux_vache1Vous ne semblez pas avoir été un grand fana de l’amicalisme classique ?
J’ai baigné longtemps dans l’amicalisme. Normal, mon père a été trésorier de l’amicale d’Espalion pendant 25 ans. Mais je trouvais que cet amicalisme était un peu restrictif, trop resserré aux seuls patrons de bistrots. Avec l’ACL (Académie du Couteau de Laguiole) on a essayé une forme plus moderne de communication et d’apport au Pays en touchant des médecins, des professions libérales, des artistes…

Dans l’évolution du pays, y-a-t-il des aspects qui vous hérissent le poil ?
Je suis plutôt globalement satisfait de ce qui se passe. Je crois qu’on est à l’abri des éoliennes sur l’Aubrac, je fais d’ailleurs parti d’une association à Saint-Urcize. Evidement, si quelques mâts d’éoliennes se montaient sur l’Aubrac, je deviendrais hystérique. L’Aubrac, je l’arpente, je le photographie jour et nuit, ils ne peuvent pas m’esquinter mon pays…

Alors tout va bien ?
En fait, j’ai un reproche, une incompréhension lancinante. Alors que des gens sont partis à Paris porter du charbon et de l’eau dans les étages en travaillant jour et nuit, je ne comprends pas qu’aujourd’hui, il y ait tant de mollesse en Aveyron. Avec un pays comme ça, on devrait trouver des produits fantastiques comme dans d’autres régions de France, en Alsace, en Provence, en Bretagne. Quand on regarde par exemple le Pays Basque et les jambons qui s’y font. Pourquoi sommes-nous condamnés à ne faire que de l’ordinaire, des jambons trop salés… Pourquoi personne ne fait du haut de gamme. Idem pour les légumes qui explosent dans le monde entier. Les supérettes de l’Aubrac ne proposent que des tomates qui ont la texture du plastique. Evidemment, il y a les Valadier, les Bras et d’autres, mais dans une région vierge comme la nôtre, il devrait y avoir des quantités d’initiatives.

dereux_vache2
Justement quand on parle alimentation, vous n’êtes pas inquiet de la tournure que prennent les choses… dégradation de la qualité des produits, et les effets pervers comme la généralisation de l’obésité ?
Je suis optimiste car les générations montantes vont réagir et trouver des solutions. L’écologie se développe.J’appartiens à une génération perdue qui a avalé du DTT et fumé des Lucky Strike sans filtres. Les jeunes veulent sauver leurs enfants. Le bio est trop cher pour l’instant, mais ça va s’arranger, je suis optimiste.

Brumes
Espace 117 du 18 au 22 mai 2010
117 rue St Dominique – Paris 75017